
Nutridev, c’est un programme, mais c’est avant tout une méthode originale et innovante pour lutter contre la malnutrition infantile, qui se décline dans chaque pays en s’adaptant aux contextes locaux.
La malnutrition est responsable, de façon directe ou indirecte, de trois millions de décès d’enfants chaque année dans le monde, soit un décès sur deux. Différentes formes coexistent : la malnutrition aiguë (10% des enfants de moins de 5 ans), la malnutrition chronique (30% des enfants de moins de 5 ans dans les pays en développement), les carences en micronutriments, le surpoids et l’obésité.
La malnutrition est particulièrement dévastatrice au cours des 1000 premiers jours de l’enfant. Elle entraîne des séquelles irréversibles : retard de croissance, morbidité, handicaps physique et mental. La malnutrition alimente le cercle vicieux de la pauvreté et du sous- développement, en ne permettant pas aux nouvelles générations de contribuer au développement de leur pays. C’est pourquoi en plus des enjeux de santé publique, prévenir la malnutrition dans les pays du Sud est un enjeu majeur de développement.
La malnutrition dans les pays en développement résulte d’une alimentation inadaptée et de maladies. Elle dépend de facteurs multiples, notamment :
C’est une action sur ces différents déterminants qu’il faut mener pour prévenir la malnutrition, et en particulier la malnutrition chronique dans les pays en développement.
Le programme Nutridev défend 3 axes d’intervention complémentaires :
Cela passe par le renforcement des acteurs locaux, le recours à des acteurs d’influence dans les communautés pour favoriser la transmission locale des savoirs ou encore le recours aux médias de masse ou aux nouvelles technologies de l’information et de la communication (téléphonie mobile).
Ce soutien porte d’une part sur le développement et la production d’aliments adaptés aux besoins nutritionnels, aux habitudes alimentaires, aux normes de qualité internationales et aux bas revenus des familles ; et d’autre part sur la promotion et la distribution de ces produits dans des réseaux de commercialisation diversifiés et/ou innovants.
Améliorer la qualité des services de santé en formant les acteurs de santé et en appuyant les politiques nationales de santé communautaire. Ce pilier est mis en place en étroite collaboration avec les experts santé du Gret, et des liens sont fait avec des dispositifs de protection sociale santé.
La méthode Nutridev se met en œuvre à travers différentes étapes qui permettent d’analyser les contextes et d’adopter des solutions adaptées :
Lorsque le contexte le justifie, et que des aliments fortifiés de qualité ne sont pas disponibles ou accessibles localement pour les enfants de 6-23 mois, les femmes ou les enfants d’âge pré-scolaire ou scolaire, le programme Nutridev favorise leur mise à disposition. Pour cela, il accompagne le secteur privé local sur :
Le développement de produits fortifiés (farines à cuire, farines instantanées, compléments alimentaires, biscuits, boissons fortifiées, etc.) répondant aux besoins nutritionnels de la cible, adaptés aux habitudes alimentaires et aux conditions sanitaires des localités d’intervention, utilisant les produits locaux et disponibles à un prix accessible au plus grand nombre.
Selon les pays, les entreprises appuyées peuvent être des micros ou petites entreprises (souvent le cas en Afrique de l’Ouest), ou des entreprises de taille moyenne venant des secteurs agroalimentaire ou pharmaceutique (Taf à Madagascar, PPM au Cambodge). Chaque type d’acteur est appuyé selon ses besoins, pour produire aux normes internationales de qualité.
Le Gret trouve des opportunités de distribution originales quand les circuits traditionnels manquent, et accompagne les entreprises à promouvoir leurs produits à travers la communication de masse ou le marketing social de proximité.
Par exemple au Burkina Faso, le Gret a mis en place un réseau de femmes entrepreneures pour la distribution des aliments fortifiés dans les quartiers précaires de Ouagadougou.
La sensibilisation accompagne obligatoirement la promotion commerciale sans en avoir les mêmes objectifs, dans la mesure où elle vise un changement de pratiques des familles vers une meilleure prise en compte des besoins nutritionnels, d’hygiène et de soins de l’enfant et des femmes enceintes et allaitantes. A l’occasion d’animations de masse (radio, télévision, téléphonie mobile), de groupes (fêtes de quartiers, théâtre-forum, ciné-débat) ou par des approches individualisées (visites à domicile, séances de pesée), des messages adaptés aux contextes et aux besoins sont diffusés aux familles. Le système de santé et organisations locales sont formés et outillés pour être les acteurs majeurs de la sensibilisation au niveau communautaire.
Au Burkina Faso, nous organisons par exemple des cinés-débats dans les villages, explique Tahirou Traoré, responsable du programme Nutridev au Burkina Faso. Nous projetons un film d’une vingtaine de minutes, une fiction jouée par des acteurs burkinabé sur un problème de malnutrition infantile ou des interviews d’experts. La projection est suivie d’un débat entre les habitant-e-s, les agents de santé et l’équipe du Gret. Tout le village est invité ! C’est aussi l’occasion de poser des questions aux agents de santé.
Tahirou Traoré,
responsable du programme Nutridev au Burkina Faso
Afin de briser le cercle vicieux malnutrition-maladie-pauvreté, le Gret agit pour améliorer la santé des populations vulnérables à la fois avec le programme Nutridev via des actions de sensibilisation aux soins materno-infantiles et de planning familial (> Voir la vidéo sur une campagne de sensibilisation menée au Cambodge), et l’amélioration de la qualité des services de santé, mais également avec d’autres programmes du Gret pour le développement de dispositifs de protection sociale santé.
En savoir plus sur le programme « santé: nutrition et protection sociale » du Gret.
Nutrition et agriculture sont très liés puisque la sécurité alimentaire est une condition nécessaire à un bon état nutritionnel. L’agriculture joue un rôle important par la production d’aliments, l’accès à l’emploi et à des revenus monétaires, mais l’augmentation de la production agricole est loin d’être une réponse suffisante pour lutter contre la malnutrition. L’accès, la qualité, l’utilisation des aliments et les bonnes pratiques d’alimentation des femmes et des enfants les plus vulnérables à la malnutrition sont essentiels. Le travail des femmes et l’utilisation des revenus agricoles pour des soins de santé peuvent jouer un rôle important sur la nutrition.
Le Gret cherche à mieux comprendre et appréhender ces liens entre agriculture et nutrition dans différents contextes. Dans plusieurs pays (Burkina Faso, Madagascar, Haïti, Myanmar), Nutridev mène des projets intégrés pour améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle des familles à l’échelle d’un même territoire.
Bien souvent, les familles défavorisées ont des difficultés à préparer des repas équilibrés pour leurs enfants (ingrédients parfois difficiles à trouver, prix élevés, manque de temps pour préparer le repas, manque de connaissances sur l’équilibre alimentaire, etc.). La mobilisation du secteur privé local dans la production et la mise en marché d’aliments de complément manufacturés est une solution permettant d’apporter des aliments de qualité, rapides et faciles à préparer et accessibles au plus grand nombre. Le secteur privé local peut prévenir la malnutrition en produisant localement ces aliments, en les commercialisant à des prix accessibles et en contribuant à créer des emplois pour participer au développement économique des pays.
À Madagascar, le Gret est à l’initiative de la création de la première entreprise sociale de lutte contre la malnutrition : Nutri’zaza.
Certaines zones très touchées par la malnutrition subissent des crises récurrentes, climatiques, alimentaires (période de soudure), multifactorielles. Dans plusieurs pays, le Gret teste des solutions pour faire le lien entre urgence et développement et garantir des réponses en temps de crise répondant au mieux aux besoins nutritionnels des familles.